An image of two brown man looking straight at the camera. One of them is appears to be sitting, the other one is standing behind, holding each other's hands. They both wear brown sweaters.

 

Cela fait neuf ans que Norman et G se battent pour leurs droits en tant que couple gai. Une lutte qui les a conduits du Honduras, leur pays de naissance, vers les États-Unis, où ils ont demandé l'asile et où ils ont vécu pendant six ans, et plus tard vers le Canada, où ils habitent depuis maintenant trois ans en attendant l'issue de leur demande d'asile. Ce parcours s'est avéré important pour Norman et G car, étant en couple depuis 13 ans, ils se sentent finalement à l'aise de vivre ensemble au vu et au su de tout le monde, comme couple et comme famille. Norman estime que cela l'a aidé à être qui il est vraiment : « Il y a dix ou 15 ans, je ne pouvais pas être moi-même. Je ne pouvais pas vivre comme je vis actuellement. Un jour, j'ai rencontré G et je suis tout simplement tombé amoureux. En nous avons décidé de quitter notre pays car les gens là-bas nous blessaient tellement. »

Les deux hommes étaient des professionnels accomplis dans leur pays d'origine : Norman était pharmacien et G, ingénieur. Au début, ils ont demandé l'asile aux États-Unis sur la base de la persécution politique car les relations de personnes du même sexe n'y étaient pas reconnues. Leur avocat leur a suggéré d'épouser des femmes, question de devenir plus crédibles aux yeux des fonctionnaires d'immigration. Bien qu'ils aient énormément hésité à déposer une demande frauduleuse, Norman et G ont suivi le conseil de leur avocat. Non seulement leurs respectives demandes d'asile aux États-Unis ont été rejetées malgré le fait d'avoir marié des femmes, mais G a été menacé de déportation.


Norman et G savaient tous les deux qu’il leur était impossible de retourner au Honduras, où ils sentaient qu’ils ne pourraient jamais vivre librement. Un ami leur a dit que le Canada serait peut-être une société plus accueillante envers les réfugiés et les gais, si bien que Norman et G ont décidé de déposer une demande d'asile ici. À leur arrivée au Canada, ils ont éprouvé un énorme soulagement, après tant d’années à se sentir menacés de représailles de la part des policiers et de l’État, et cela, tant au Honduras qu’aux États-Unis. Le fait de savoir leurs droits protégés ici leur a permis de se sentir en sécurité lorsqu'ils entamaient leur démarche auprès des services d’immigration. G se souvient : « J’ai pleuré à ce moment parce que tout cela me faisait sentir tellement heureux et ému. Car Norman et moi, nous pouvions enfin parler de nous deux ensemble. » 


Ils vivent désormais à Hamilton, en Ontario, où ils passent leurs journées à faire du bénévolat, à suivre des cours et à faire des démarches pour la reconnaissance de leurs titres de compétences professionnelles acquis à l’étranger. Même s’ils étaient des professionnels certifiés au Honduras et qu’ils ont passé par le processus pour obtenir une accréditation aux États-Unis, le Canada ne reconnaît ni l’un ni l’autre. Ils rêvent du jour où ils pourront exercer de nouveau leur profession. Le retour en classe a été une expérience mitigée. Norman s’est retrouvé avec un camarade de classe homophobe et un professeur qui n’intervenait guère. Pour sa part, G a décidé un jour de révéler son homosexualité à sa classe. Il a dit devant tout le monde : « Je vais vous dire la vérité. Je ne suis pas là en tant que réfugié politique. Je suis là parce que je suis gai. Et je vis avec mon compagnon de vie. » Il a demandé aux gens dans la classe de garder son histoire confidentielle, mais il avait jugé important de leur faire part de ce qu’il vivait. Certains de ses compagnons de cours ont depuis fait la connaissance de Norman, et il ne regrette pas sa décision de parler ouvertement de sa vie. 


Norman et G ont un sens profond de la communauté. Grâce à leur bénévolat au sein d’un centre pour personnes âgées, ils ont pris connaissance de nombreuses ressources offertes ici, qui leur auraient d’ailleurs été utiles à leur arrivée au Canada : « Ici, nous avons découvert beaucoup de ressources. Nous restons conscients que nous aurons à subir de la discrimination, car l’homophobie existe partout dans le monde et dans toutes les couches de la société. Mais nous savons quel numéro composer. Nous savons à qui nous adresser. » (G). Ils apprécient également l’opportunité de fréquenter d’autres nouveaux arrivants allosexuels : « Car on peut parler, et se sentir interpelé par les récits des autres, et partager tout ce qu'on a vécu. Et on ne se sent pas jugé,
car les gens sont tout simplement comme nous. » (Norman). 


Pour Norman et G, le fait de vivre dans un pays où ils croient que leurs droits sont protégés les aide à se sentir en sécurité, malgré l’homophobie à laquelle ils se heurtent souvent. Bien que G fasse encore des cauchemars à la suite de ce qu’il a vécu, et qu’il aimerait consulter un conseiller queer qui l'aiderait à guérir de ses traumatismes, il se réjouit de ce que Norman et lui puissent vivre ensemble en tant que conjoints de fait et parler librement de leur relation. En attendant de recevoir la décision concernant leur demande du statut de réfugié, G écrit un livre racontant leur histoire. Il attend toujours d’en connaître le dénouement et espère que le Canada le lui fournira.

 


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